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Baisses de prix et durabilité
Est-ce vraiment la bonne voie ? 

Edito Agri, Anne Challandes 

Les annonces de réduction des prix dans la grande distribution se multiplient et donnent à réfléchir. Plutôt que de détruire ainsi de la valeur ajoutée, ces baisses seraient mieux investies dans de meilleurs prix aux producteurs, pour une agriculture plus durable. En effet, même si les distributeurs affirment ne pas faire pression sur les prix aux producteurs, celle exercée sur les intermédiaires se fait sentir. En témoigne l’annonce récente de percevoir une marge supplémentaire sur le dos de ses fournisseurs de légumes. Est-ce cela la durabilité ? Sur leur site internet, les grands distributeurs décrivent leurs objectifs de durabilité et se proclament volontiers acteurs engagés dans le développement durable. Pour l’agriculture par exemple « 400 actes plutôt que la parole ». De quel type de parole est-il ici question ? Comment appréhender cette devise ? Dans le sens de la parole donnée ou plutôt comme le chantait Dalida « paroles et paroles et paroles » ? 

Dans les affaires en général comme dans l’agriculture, la parole donnée est en principe valable jusqu’au prochain tour de négociation. Elle définit les conditions financières sur lesquelles s’appuyer, de la mise en production jusqu’à la récolte et la commercialisation. Elle offre sécurité dans la planification et permet aux paysannes et paysans de prévoir et de calculer dépenses et recettes. Le prix défini pour la commercialisation de la production agricole est une composante importante du revenu des familles paysannes puisque les 4/5 de celui-ci sont globalement obtenus sur les marchés. Cet élément économique représente un des trois aspects de la durabilité, qui nécessite d’être encore amélioré. 

Dans le cas présent les actes ne respectent pas la parole annoncée. Se prévaloir de la durabilité doit aussi se traduire dans les actes. La durabilité n’est pas une option gratuite à dimension variable. Elle ne peut pas rester qu’une parole. Elle constitue un objectif déterminant, non seulement annoncé mais aussi largement accepté, pour l’élaboration du système agro-alimentaire, condition sine qua non à la pérennisation de notre agriculture et de l’approvisionnement du pays en denrées alimentaires de qualité et de proximité. Afin d’assurer cet aspect économique de la durabilité, et partant également une partie de l’aspect social, la couverture des coûts de production est impérative. D’ailleurs, la marge de progression pour atteindre l’objectif d’une rémunération horaire moyenne mesurée de 40 francs, est encore grande. Sans agriculture rentable, pas d’agriculture durable ! Il est donc temps pour la grande distribution de tenir ses engagements et de placer ses actes sur la même ligne que ses paroles, afin qu’il en reste plus qu’une simple mélodie. 

Anne Challandes